Micropannage


Le micropannage est une méthode de classification applicable à des petites quantités de concentrés de sables lourds (1 gramme environ). Elle permet de classer et d'isoler des particules inférieures à 100 microns, on parvient ainsi à concentrer et à isoler très facilement des particules lourdes dont la taille n'atteint  qu'une vingtaine de microns.

Le micro-pan est une boîte ronde à fond plat, de préférence de verre, de 9 à 10 cm de diamètre, j'utilise pour cela un cendrier de verre noir, mais le verre incolore permet de changer facilement la couleur du fond en posant le micro-pan sur un papier de la teinte désirée. Les matières plastiques, qui "mouillent mal", sont à éviter.

1- Chargement du micro pan:
Une pincée de sables lourds (1 g maxi) est déposée dans le récipient, contre de la paroi qui constitue le rebord.
Il est préférable de disposer de sables déjà rincés et concentrés en lourds pour éviter les poussières et limons qui engendrent opacité de la solution et flottation systématique des lourds très fins.

2- Mouillage:
Déposer une goutte de détergeant ou de tensio-actif à l'opposé des sables, ce produit est destiné à éviter la flottation habituelle des micro particules.
Ajouter délicatement à la pissette eau ou eau+alcool ou alcool 90° en diluant la goutte jusqu'à obtenir une profondeur d'environ 2 mm de solution. Si malgré tout quelques éléments ont décidé de jouer la flottation, il faut les couler en frappant le micro-pan sur la table ou en remuant les zones de flottation dans la solution avec un cure dent.

3- Concentration préliminaire:
Incliner le micro-pan à 45° en maintenant les sables lourds au point le plus bas. Secouer un peu et tapoter sur la table pour amorcer une classification gravitationnelle. Remettre délicatement le micro pan à l'horizontale sur la table en veillant à de ne pas perturber ce premier classement.

4- Classification giratoire:
Le pan posé sur un plan de travail parfaitement lisse et horizontal est saisi d'une main, entre le pouce et l'index et mis en rotation décentrée, en contact avec le plan de travail, à raison de 1 tour par seconde. Très rapidement, les matériaux les plus légers migrent au centre du pan alors que les plus lourds s'étalent et se classent selon leur densité dessinant un bout de spirale. Les plus lourds (or, platine) restent presque isolés sur la zone de placement d'origine, les autres minéraux lourds se regroupent en zones bien distinctes réparties selon une densité décroissante, en une sorte de queue de comète spiralée, où les plus lourds sont dans la tête. 6 à 15 rotations suffisent à obtenir une bonne classification, et les minéraux ainsi classés peuvent alors facilement être observés à la binoculaire:

Sables lourds du Rio Navelgas (Asturies, Espagne)
classés par micropannage en queue de comète spiralée:
Or, zircon, sables ferro-magnétiques, grenat, quartz et divers légers

Or et zircon en tête de classification

5- Tri et récupération:
Si des quantités importantes de sables légers sont présentes, on peut les aspirer à la pissette puis une refaire une classification.
Si les sables ferro-magnétiques sont très abondants on peut les retirer à l'aide d'un aimant avant de refaire une classification.
Si un minéral abonde et s'isole facilement (Zircon, Barytine...) il peut être aspiré à la pipette.

La récupération des grains d'or micrométriques et des minéraux rares se fera à l'aide d'un cure dent imprégné de salive, à la binoculaire, après réduction à la pissette puis évaporation de la solution de pannage.



Mille mercis à Monsieur Jacques Jedwab, chercheur et professeur émérite de l'Université Libre de Belgique qui m'a indiqué cette recette appelée "Micropannage dans un boîte de Pétri".

Jacques Jedwab est un passionné  de minéralogie et spécialiste de l'échelle micrométrique, il a entre autres travaillé sur les minéraux du groupe du platine et a inventé nouveau un minéral: la Lubéroite (Pt5Se4), rencontrée en particules micrométriques dans les alluvions platinifères du fleuve Lubéro au Congo, dans les années 1950.
Ses études sur les variantes d'or du Brésil, en particulier sur les mystérieux grains d'or noir (ouro preto) et d'or pourri (ouro podre) ont montré que cet or est enrobé d'une couche d'un composé complexe d'hydroxyde de platine-palladium, (composé que l'on croyait absent sur terre) et que cet or contient des inclusions de palladium et de platine généralement sous forme de composés complexes et d'altérations. Ses photos de ces grains en section polie au microscope électronique sont de véritables cartographies de coupes en vue micrométrique où chaque matière localisée a été analysée et identifiée à la micro-sonde électronique.

Actuellement en retraite, Jacques Jedwab n'a point cessé ses recherches, il m'expliquait récemment: "La minéralogie de l'or est beaucoup plus complexe et variée que l'on pense communément, même chez les minéralogistes professionnels. Le fait que l'on trouve des occurences répétées de potarite aurifère (Pd-Au-Hg) un peu partout montre que l'on doit s'attendre à des surprises. J'ai aussi trouvé des cristaux d'amalgame d'or naturel en Orégon, à un endroit pourtant bien étudié depuis 1848, mais sans MEB. J'ai aussi dans mes cartons (informatiques!) une trouvaille d'iodure d'Au au Nevada: le composé est prévu par la théorie, mais n'a jamais été observé. Le Nevada est très riche (de mon point de vue des microminéraux), et j'en ai encore pour un bout de temps pour exploiter mes observations. Je suis aussi tombé sur une occurrence de Pd natif, ce qui est une première pour les USA."


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